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  • : Le blog de topotore
  • : Les mots invitent à leur traduction afin d'entrevoir sur le mode singulier de chacun cet "au-delà de la langue" si étonnant. La poésie illumine cette frontière.
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17 novembre 2008 1 17 /11 /novembre /2008 17:14

Tout au fond de moi, cette brûlante déchirure qui ne cesse de jaillir et de m’inonder, comme un cratère de feu d’où s’échappent le souffre et l’obscure odeur de l’inacceptable ! Une arme étrange s’acharne à me dépecer, s’acharne sur la plaie déjà ouverte, sans cesse ouverte, dont nul mot ne peut dire la douleur, comme si la souffrance vidait ma langue depuis l’intérieur, détournait ma voix en la pliant vers le dedans, la contraignant à la torsion du mutisme.


La main même de ceux que je chéris, la main sanguinolente de celui vers lequel pousse mon plus intime désir, cette main, comme étrangère à l’autre, comme dirigée par des forces occultes et ombrageuses, manipule l’arme invisible et me torture là même où se propage la destruction et l’humiliation. Mon corps, en son centre, en son ventre, en sa matrice, brûle comme un foyer rougi dont la fumée acre lacère mes poumons. Et pourtant, il n’a d’autre combustible que l’ineffable source de palpitation, ma vie de femme, ma vie de souffle, d’ardeur et de courage pour renverser les torrents violents, pour barrer les fleuves de boue afin de protéger les miens.


Je suis seule avec le feu. Je cherche l’eau, je cherche la mer, je cherche l’amour et la passion tempétueuse qui viendrait à mon secours, qui dominerait sur le brasier et renforcerait mon être autour des cendres sublimées alors en poussières d’étoiles. Nul ne le peut. Le vide même attise les flammes, mon ventre est broyé de tous ces viols et de toutes ces humiliations qui obturent les ouvertures. Mes lèvres sont cousues d’horreur et brûlent de terreur. Elles saignent de se vider des cris étouffés. Ils me veulent vide et creuse, silencieuse, sans issue, sans voix, sans seins pour leur dire mon amour et leur donner ma tendresse. Les monstres mordent, les monstres s’essoufflent et s’évaporent pour laisser place aux suivants.


Je me sens révulsée, toute retournée dans mes chairs jusqu’à l’exposition de mes os douloureux, explosée sous la mitraille de leurs regards qui me mutilent et me séquestrent dans l’absence, exhibée à tous. Ma pudeur bafouée, mon temps ignoré, mon être raillé ! Je n’ai plus pour murs que châtiments et ignorances. Le sol même m’écrase après m’avoir ensevelie. Je suis poussée à l’extrême sanction de croire qu’ils auraient de bonnes raisons de me châtier, pour la faute d’être femme. Oui ! Ils m’ont poussée à transformer mon corps en poussière de combustible qui alimente sans arrêt le bûcher qui me consume à l’infini.


Ils m’ont dit de me taire. Mes forces brûlent d’un feu que le silence anime sans cesse. Mon âme se viderait si mon corps ne me réveillait pas, et cela très souvent, par les souffrances qu’il doit subir, mystérieusement, inéluctablement. Mes genoux s’écorchent, mes pieds se dérobent, mon sexe s’exile, ma poitrine se vide, ma tête hurle dans son enfer.


Je voudrais sortir de la plaie. Je meurs de ne pas vivre.

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