Il a brûlé ma force et forcé mon intime.
Soignez bien le bourreau, oubliée, la victime.
Déjà toute petite le marâtre saisissait
Mes deux tresses dorées que sa main salissait.
Pour m’aider à plier m’appelait « petite fée »
Arrangeait sa serviette sur la table carrée.
Il a ôté ma vie, exhibé mon intime.
Soignez bien le bourreau, oubliée, la victime.
« Tu es ma perle rare et je vais doucement
T’élever au dessus des enfants de six ans.
N’en dis rien à Maman qui tomberait malade
Découvrir notre corps est une promenade. »
Il a saigné mon âme et courbé mes abîmes.
Soignez bien le bourreau, oubliées, les victimes.
Et le doigt sur mes lèvres, il perdait son haleine
Pour me faire princesse en cognant dans la veine.
Je partais en fumée. De tout je me souviens ;
D’une voûte de cave, je vois bouger ses reins.
Il a tordu mon cœur et touché mon ultime.
Soignez bien le bourreau, oubliée, la victime.
Le monde est là ! Les yeux fermés, l’oreille sourde !
Je suis un trou. Je suis un manque ou « boule lourde »,
Car j’ai mangé plus qu’il ne faut pour me remplir
Et j’ai forcé ma gorge en feu pour tout vomir.
Il tua mon désir, se planta sur ma cime.
Soignez bien le bourreau, oubliée, la victime.
Peine encourue, tous soins en sus, déjà vingt ans
Il touche au but et ces années sont effacées.
Mes chairs à vif restent cousues et méprisées,
Peine perdue, soins évités, le vide est sang.
Barricadée ! Ma vie ! Révulsée dans sa peau,
Oubliée, la victime ! Soignez bien le bourreau !