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  • : Le blog de topotore
  • : Les mots invitent à leur traduction afin d'entrevoir sur le mode singulier de chacun cet "au-delà de la langue" si étonnant. La poésie illumine cette frontière.
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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 18:47

Mon âme est un orchestre caché ; je ne sais de quels instruments il joue et résonne en moi, cordes et harpes, timbales et tambours. Je ne me connais que comme symphonie.

 

Tout effort est un crime, parce que toute action est un rève mort.

 

 

Tes mains, colombes captives.

Tes lèvres, colombes silencieuses (que mes yeux voient roucouler).

Tous tes gestes sont des oiseaux. Hirondelles lorsque tu te penches, condor lorsque tu me fixes, aigle dans tes extases d'orgeuilleuse indifférence.

Il n'est que bruissement d'ailes, ce lac de ma contemplation de toi.

Tu es toute entière ailée (...)

 

 

Il pleut, il pleut, il pleut ...

Il pleut continuellement, plaintivement ...

Mon corps fait trembler mon âme de froid... Non pas du froid qui règne dans l'espace, mais de celui qui naît de voir tomber la pluie...

 

 

Tout plaisir est un vice - car rechercher le plaisir, c'est ce que fait tout le monde dans la vie, et le seul vice vraiment noir, c'est de faire comme tout le monde.

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 18:35

  Septembre 2009

 

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

 

Je croyais ! Je croyais que ce serait fini à tout jamais ! Je croyais que les deux guerres mondiales avaient sonné la fin des humiliations ! Je croyais qu’il n’y aurait plus jamais d’occupations, de tortures, de camps, de réfugiés, de déplacés, de spoliés, de morts ! Je le croyais !

Me voilà prisonnier dans la bande de Paca, privé d’eau, privé de courant, privé de gaz, de farine, de matériaux, interdit de circulation, suspecté de terrorisme parce que je résiste à l’injustice. Aucun membre de ma famille n’est à l’abri des abus, ni des obus de l’occupant. Certains sont en prison, quelque part, sans visite, sans soins, soumis aux pires maltraitances que l’homme n’ait jamais imaginées, l’abandon dans l’incertitude et l’isolement. Même le temps leur est enlevé. Et pour certains, même le jour, ne serait-ce que de tout petits rayons !

 

Le monde entier nous ignore, dans son adoration du pouvoir idéologique des finances et de ses dérivés. Sur l’ancien Cours Mirabeau, rebaptisé les Cours des Générales de Banque, on défile à la gloire de la croissance. On chante le cap historique des dix mille points du Cac en déambulant à genoux pour qu’il ne redescende plus jamais ! On se signe avec l’eau de la fontaine du monument de la Spéculation, l’ancienne Rotonde, et les adeptes y baptisent leurs enfants !

 

Dans le même temps, les occupés de Marseille, ceux qui subissent l’apartheid sous le grand mur « de la sécurité », ceux qui croupissent dans les parkings souterrains ou plus récemment dans les tunnels du métro, les résistants qui ne veulent pas qu’on leur impose une vie d’iniquité et d’injustice, les utopistes qui rêvent encore d’un monde plus juste et d’une justice sociale, tous ceux-là ne peuvent plus vivre. Ils sont condamnés à débarrasser leur propre plancher au nom de la paix universelle dans la spéculation et la paresse du profit facile.

 

A quoi sert l’enrichissement s’il n’a d’autres conséquences que la production des armes de destruction. (Pléonasme !) On ne produit plus que des armes qui suscitent le profit ! Les résistants devront payer les quelques temps de ciel bleu dont ils peuvent encore profiter, le ventre creux, et la peur en dedans. Abdu dit que c'est pire là-bas !

 

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 18:10

 

  Août 2009

 

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

Pourquoi la Place Estrangin est-elle interdite aux marseillais ? Des blindés préviennent de tout accès, même à pieds. Jusque là, les riverains de la rue d’Armeny et de la rue d’Arcoles devaient se munir d'un laissez-passer renouvelable tous les six mois. Depuis peu, ils doivent le renouveler tous les trois mois, avec une liste de documents impressionnante pour justifier de leurs droits à vivre chez eux. A la préfecture, juste à côté, la queue s’allonge tous les jours et l’attente fait souvent perdre une journée entière. On demande la facture EDF la plus récente. Mais chacun sait que les services postaux ne fonctionnent plus. De plus, la distribution de courant laisse à désirer. Une heure par jour ! Quand la facture arrive, elle date souvent de plusieurs mois. Le cachet de la poste ne faisant plus foi, le guichetier prétexte que la dite facture n’est pas récente et refuse d’accorder le renouvellement du laissez-passer. Pour le gaz, c’est pareil ! Quand à l’eau ! L’occupant ne laisse plus qu’un goutte à goutte et tous vérifient sans arrêt que le grand bassin, tout en haut de Périer, est vide.

 

Yan s’attend à ce que ses documents ne soient plus valables. La journée passée debout sur le trottoir l’a épuisé. Il a soif, faim et chaud. Ses forces lui font défaut et la moindre contrariété risque de lui donner le coup de grâce. Il sent que rien ne va se passer comme il faudrait.

Déjà, devant lui, cinq personnes ont fait la queue pour rien. Elles devront revenir le plus vite possible car leur papier expire dans quelques jours. Jamais il n’avait vu des visages aussi absents, des regards inversés qui ne voient plus qu’en dedans une misère fleuve, un désespoir gouffre et une fin définitive. Yan est jeune mais il se sent vieux. Il a toujours vécu sous l’occupation et se rend compte des dégâts irrémédiables sur les personnalités, toutes écrasées lentement dans un tout petit nombre d’années. Il suppose que son regard est aussi fermé que ceux qu’il a vus. Il repense à sa jeunesse que ses parents avaient entourée de mille contes de fées afin de masquer la dure réalité. Il se souvient de l’école et des parties de ballon autour de la fontaine, devant la Banque de France, dont il mesurait déjà toute l’importance. Il se souvient des avantages du métro qui les menait à la Rose en quelques minutes pour rendre visite aux grand-parents.

 

Arrive son tour. Tout va bien ! Sauf sa carte d’identité. Yan Miloud Armand Massahoui ! Voilà une identité bien délicate à vivre dans le climat du moment !

En une fraction de seconde, il fait le rapprochement entre ce nom et celui du dernier résistant soupçonné d’avoir fait sauter le train à Venelles, celui qui transportait les financiers de Gap. L’accord entre les régions n’aura pas pu être signé ! Terrorisme !


Il referme ses documents dans la chemise et se glisse comme un serpent dans la queue pour atteindre la sortie avant que le préposé n’ait eu le temps de réagir.

Dehors, il respire et rassemble ses dernières forces pour paraître normal. Le temps de passer chez lui et de dire à sa femme qu’il va se cacher jusqu’à nouvel ordre, et il marche. Il ne sait tout d’abord où aller, mais ses pas le dirigent vers la gare Saint Charles.


Sous les grands escaliers, dans les poutres et les poutrelles, il se hisse et se cache. La première nuit sera longue mais pleine de conseils. Demain ! Demain, je réussirai à prendre un train. Je ne sais pas comment ! Il faut sortir de la bande de Paca !

 

 

 

 

 

 

 

 

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 17:06

  Août 2009

 

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

 

Maryse va accoucher. La plus proche des cliniques est à dix minutes à pieds. Moussa, décide de s’y rendre pour attirer l’attention d’une sage femme. Mais depuis la rue du Docteur Combalat jusqu’à la rue du Docteur Escat, il se demande s’il sera de retour avant que son épouse ait commencé le travail.

La clinique Bouchard est ouverte et sa maternité aussi. Moussa demande s’il peut mener Maryse pour un accouchement précipité. La réponse est oui ! Mais il n’y a pas de sage femme. Il n’y a pas de docteur. Il n’y a que des infirmières bénévoles qui font tout ce qu’elles peuvent pour aider les mamans, avec les moyens du bord. (C'est-à-dire avec rien !) Moussa pense alors à son voisin du dessous qui est médecin et dont l’activité professionnelle s’est arrêtée depuis longtemps, mais dont le rayonnement se montre sans égal auprès de ses compagnons de malheur et de misère.

 

En courant, il descend la Rue Edmond Rostand mais rencontre une brigade volante au niveau de la rue Sainte Victoire.

Vos papiers ?

Voilà !

Pourquoi courez-vous ainsi ?

Ma femme va accoucher d’une minute à l’autre !

Votre adresse ?

Rue du Docteur Combalat n°8, 3°.

Profession ?

Sans, depuis cinq ans !

Avant ?

Conducteur de métro !

Syndiqué ?

Non !

On va vérifier !

Messieurs, il me faut aider ma femme !

Les gens qui courent sont suspectés.

(...)

Bien souvent, ils ont fait quelque petite affaire et se dépêchent de rentrer.

Je viens de la clinique Bouchard. Il n’y a pas d’affaire possible. Plus rien !

Videz vos poches !

Fouillez-moi, si vous voulez, mais faites vite !

On n’a pas d’ordre à recevoir des rats de tunnel !

(...)

Tu vois ! Cher collègue ! Il ne dit rien. Qui ne dit rien consent !

Messieurs ! Je n’ai jamais fait de politique et ne suis pas syndiqué. La seule chose qui me préoccupe là, c’est ma femme.

Un plus ! Progéniture captive ! Profits assurés ! Croissance parallèle entre produits dérivés et démographie galopante ! Crois moi, collègue, la puissance libérale non seulement s’adapte et s’assouplit mais s’amplifie à cause de la natalité des bêtes de trait ! Dommage qu’il y ait tant de terroristes à Marseille. La bande de Paca, c’est eux qui la veulent !

Je ne comprends rien à vos propos, puis-je disposer ?

Quand est-ce que vous allez comprendre ? Soit vous rentrez dans le rang et donnez votre vie pour l’idéologie dominante qui augmente votre niveau de vie, soit vous devenez terroriste.

Je n’ai pas la tête à réfléchir ! Puis-je disposer ?

Ne vous inquiétez pas ! Si ça ne marche pas cette fois ! Vous remettrez ça !

(...)

Bon ! Allez ! Partez, en espérant que ce sont des jumeaux !

 

Moussa était déjà loin et depuis longtemps laissait glisser les humiliations.

Quand il ouvre la porte de l’appartement, il sait que l’enfant n’est pas vivant, à la seule tête du bon médecin qui s’est déplacé d’un étage, saisi par les appels de Maryse qui souffrait les douleurs. « Je n’ai pu sauver les deux. J’ai choisi de sauver la mère. Il me faudrait de l’eau et la faire chauffer un peu. J’ai dû tirer de toutes mes forces, c’était un siège. La pauvre est un peu déchirée mais elle va s’en sortir. Il me restait des flacons d’alcool et des compresses. Je vais arranger ça !

 

L’occupation c’est tous les jours des drames chez tous ceux qui la subissent.

Moussa espère encore.

Que la bande de Paca ne soit pas la pire de toutes !

 

 

 

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 16:54

    Août 2009

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

 

Rue d’Italie déserte ! Boulevard Salvatore bloqué ! La préfecture barricadée ! Les chars Marta-Drasaud armés sur la Place Castellane ! Cinquante véhicules blindés tout le long du Boulevard Baille ! Nous restons blottis dans la cave, Andréa, mon épouse, et les quatre enfants, Lila, Célia, Yan, et Loïc. Le tout petit poste grésille dans mon oreille. Radio Paca ! Une radio clandestine que quatre jeunes journalistes alimentent depuis quelques planques dont ils ont le secret, toutes les vingt minutes pendant trois minutes. Je crois qu’ils ont beaucoup de complices dans les immeubles, organisés en réseau, avec certains dissidents de Charly FM, qui soutient désormais les occupants, sans le reconnaître.


Encore cinq minutes avant la petite communication, cinq très longues minutes !

« La Finance s’apprête à donner l’assaut dans tout le quartier entre la Rue de Rome et le Cours Lieutaud. Des hélicos tournent au dessus de la zone. L’armée est positionnée. Elle attend probablement le couvre feux pour procéder, selon ses méthodes favorites, aux incursions de nuit. Nous conseillons à toutes les familles de tout faire pour que leur progression soit retardée au maximum. Déplacez les meubles s’il le faut jusqu’aux portes d’entrée, essayez de vous grouper dans les espaces réduits et faites les morts. Ils perdent beaucoup de temps à transporter les corps. Nous sommes partisans de la non-violence. Vous pourrez justifier de n’être pas résistants mais simplement terrorisés. Terminé ! »

 

Dans mon sous-sol, une porte dérobée ouvre sur un tunnel que j’ai aménagé pour que nous puissions y rester quelques heures. Mais nous n’avons pas d’eau, excepté cette goutte qui tombe régulièrement d’on ne sait où, et qui remplit le grand seau que j’ai eu soin de positionner à l’avance. Nous ne l’avons encore jamais bue, mais son aspect n’est pas repoussant, et son odeur est tout à fait neutre. Espérons qu’elle sera potable ! Une toute petite lampe de poche dotée de trois LED nous permet encore de profiter d’une petite lueur quand c’est nécessaire. Mais je l’utilise le moins possible parce qu’il me sera très difficile de trouver des piles pour les remplacer.

 

Ce que je crains le plus, c’est qu’ils détectent la présence humaine par leurs détecteurs infrarouges. Aussi le tunnel s’avance-t-il jusqu’à une vingtaine de mètres de la porte dont j’ai soigné l’isolation en accumulant les cartons depuis trois ans, pliés avec soin, et disposés en plusieurs couches séparées par un espace d’air statique. Nous sommes allongés sur d’autres cartons qui nous isolent du sol argileux et cherchons à respirer lentement, sans bouger.

 

Avec précautions, j’avais travaillé dans les règles de l’art pour que le tunnel présente un maximum de sécurité. Dans le Parc du vingt sixième centenaire restaient de nombreuses traverses de chemin de fer dont nous avions pensé qu’elles pourraient servir un jour. Et avant que mon break ne soit interdit de circulation, j’avais fait un grand nombre de voyages avec mon cousin pour acheminer un maximum de traverses. Ce sont elles qui étayent maintenant mon tunnel. Jamais je n’aurais pensé qu’un jour il me faudrait m’y cacher comme un rat !

 

Je pensais à toutes journées d’insouciance, quand un tremblement nous sortit du silence. Je regardais ma montre furtivement, celle de ma communion qu’il me faut remonter tous les jours, et fus étonné qu’il se soit écoulé déjà trois heures depuis notre installation. Il se peut que nous ayons dormi. Je remets la petit radio sur mon oreille juste à temps pour l’émission.

 

« Courage à tous les résistants du quartier ! Les militaires ont bien du mal à progresser grâce à votre passivité ! De nombreux blessés mais aucune fusillade ! Les blessures ne sont pas graves, en général, seulement quelques coups de rangers dans les côtes et des chutes dans les escaliers. Il semblerait que les militaires se découragent et qu’ils n’aient jusque là trouvé aucune arme. Leurs certitudes au sujet des terroristes cachés dans cette zone n’étaient qu’un prétexte pour s’entraîner encore à de telles incursions nocturnes. Bravo les résistants !»

 

Les grondements n’ont plus cessé pendant une bonne heure, puis tout devint calme. J’ai pensé que les chars étaient partis. Il me faut attendre encore vingt minutes jusqu’à la dernière émission du soir.

 

Le temps est passé ! Nous n’avons plus jamais capté cette radio. Nous saurons un jour ce qu’il est advenu des ses animateurs. Je crains le pire ! Les prisons de l’armée d’occupation ne sont pas des jardins d’enfants, et les interrogatoires musclés ne laissent pas de bons souvenirs.

 

Il est tout de même incroyable que les puissances financières puissent agir de la sorte : détruire toute une population ! Tout doucement ! Lentement ! Sur plusieurs générations ! Détruire ! Détruire ! Le fric, une nouvelle religion !

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 12:25

 

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

Marseille ne veut pas plier. Le maire s’est retiré à Aix, craignant qu’il ne soit reclus dans sa mairie, au milieu de tous « ces terroristes », dit-il ! Maire de la seconde ville de France, il se devait de suivre le pouvoir en place, ne serait-ce que pour jouir des aides de l’Etat pour l’aménagement du territoire, ou plutôt de son territoire. Avant le blocus récent qui ne cesse d’affamer la population, il avait donné son accord pour la construction de tours immenses dont ne profiteront que les groupes financiers, et qui rendront la rade de Marseille tout à fait laide, en rupture radicale de l’équilibre actuel. Depuis Aix, il exerce son pouvoir en privilégiant tous ses proches et leur accorde des faveurs, jusque dans Marseille. Il réquisitionne les plus beaux appartements de la Rue Paradis, et rétablit la fourniture des énergies.

Si la famille Landreau attend l’eau chaque jour, elle a vite fait de repérer que les voisins du dessus prennent le bain et cuisinent sans faire d’économie. Assurément des privilégiés ! Il est vrai que Monsieur Landreau était Professeur à l’Université de Saint Charles, jusqu’à ce que les mouvements gauchisants aient été pointés du doigt, interdits et que leurs membres soient menacés sévèrement s’ils continuaient leurs activités syndicales et, (c’est ce et qui est important), professionnelles. Le rectorat ne leur a même pas fait savoir qu’ils ne seraient plus payés. Le fait est là ! Ils ne sont plus payés depuis deux ans. Certains de ses collègues ont vite quitté Marseille. Mais d’autres, de moindre mobilité à cause de la famille ou de leur amour pour la région, se sont retrouvés coincés dans la bande de Paca. Les amis Girard sont dans ce cas, et bien d’autres.

En parlant de fac ! Depuis l’an dernier, toutes les facs de Marseille ont cessé les cours. Ordre du rectorat dont on rappelle qu’il se trouve a Aix-en-Provence. C’est une aubaine pour les squatters qui ont vite trouvé le moyen d’y pénétrer. Il n’y a guère que Saint Jérôme qui soit restée en dehors de toutes ces querelles. De plus, le mur sépare le cœur de Marseille de Saint Jérôme, Château Gombert, Plan-de-Cuques et tous ces coins, privilégiés par les occupants. Les flics et l’armée, en surnombre tout autour de l’enceinte de Marseille sont prêts à réagir dans les meilleurs délais.  

 

Les jeunes se regroupent dans la rue, non pas désœuvrés, comme on pourrait le penser, mais bien occupés à trouver, qui de la nourriture pour la famille, qui une cigarette, qui des morceaux de bois pour un petit bout de feu, ne serait-ce que pour un thé chaud, le café se faisant de plus en plus rare. Ils rendent des petits services en échange de quelques denrées. Il faut être bien avec les occupants qui logent Rue Paradis et se mettre en quatre pour les satisfaire en échange de quoi des surprises peuvent traverser les barrages. Il arrive que dans certains immeubles s’organise une petite vie secrète où le pauvre professeur accepte de vider les poubelles pour deux ou trois calissons qu’il partage entre les enfants. D’autres refond les peintures pour un loyer impayé. Jacques a bien accepté de ré-agencer toute la plomberie de son voisin pour un vieux poêle à bois. Il est vrai qu’en Paca le temps est suspendu, comme la vie !

 

Chacun sait que l’occupation, c’est la guerre ! Mais à la vivre pendant si longtemps, toutes les valeurs de nos vies sont bouleversées. Une des valeurs reste : c’est l’hospitalité, partager jusqu’au bien dont on ne dispose pas. La dignité de l’occupé, c’est de vivre pour le droit et le droit fondamental c’est le droit de disposer de ses biens à sa guise afin de faire vivre sa famille. C’est justement là que sévit l’occupant. Et pas seulement dans la bande de Paca !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 11:11

   Août 2009

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

Les chars Leclerc sont entrés par la Pomme. Dans moins de dix minutes, ils descendront la Rue de Rome, jusqu’à la préfecture. Ces chars sont d’une puissance terrifiante.

Les chars Casto ont déjà investi la place de la Joliette. Ils sont basés à Istres et sont entrés par le barrage de Saint Henri. Ce sont les derniers modèles de Marta-Drasaud. Plus légers que les premiers, ils sont aussi plus maniables et peuvent s’engager dans des axes plus étroits, comme la Rue Breteuil.

Les chars Cazifour restent en attente au niveau de l’Hôpital Nord. Leur vitesse de croisière les amène à la Porte d’Aix en cinq minutes.

Leur incursion peut se faire la nuit. Les soldats de l’occupation disposent d’équipements à infrarouges et s’y déplacent comme en plein jour.

 

Leur méthode est bien rodée. Ceux qui montent par exemple la Rue Breteuil tirent dans toutes les rue de traverse. Rue Saint-Saëns, Rue Francis Davso, Rue Sainte, Rue de Grignan, en suivant sur la gauche, pour le premier char, tourelle orientée à gauche. Rue Sainte, Rue Grignan, Cours Pierre Puget, Rue Roux de Brignoles, en suivant sur la droite, pour le second char, tourelle à droite. Les coups de canon sont presque tangents aux murs des immeubles, mais l’angle est calculé pour éventrer le rez-de-chaussée, et parfois faire tomber tout un pan de mur en façade. A tous les passages, c’est une vraie désolation. Les décombres obstruent la rue, les appartements sont ouverts en façade, quand les planchers ne cèdent pas. La rue Sylvabelle n’est qu’un tas de ruines, entre la rue Paradis et la rue de Rome, les rues Bel Air, Berlioz, Village, ont été détruites lors du dernier passage. Ce soir, qui sait s’il restera une fenêtre à son appartement ? C’est au petit matin qu’il est possible de constater les dégâts et de compter les morts.

 

Les blessés seront portés dans des couvertures jusqu’à l’hôpital de la Convention, le seul qui soit encore debout. Chacun se souvient avec horreur du bombardement sur l’hôpital de la Timone et dans le même jour sur l’université de médecine. Un bruit avait couru que ces bombardement auraient lieu tel ou tel jour, et beaucoup d’étudiants n’avaient pas bougé de leur petite chambre en cité. Mais les Tigres d’Euro-Colber en ont profité pour bombarder les dites cités.

 

L’armée d’occupation s’était défendue d’avoir manqué leurs cibles. « Les étudiants sont tous hostiles à notre politique de croissance financière. Ce sont les milieux qui forment les plus dangereux terroristes dont les techniques d’intimidation par gaz toxiques sont des plus sophistiquées. Nous ne pouvons accepter que notre jeunesse étudie dans les universités des armes d’un nouveau type qui risquent de compromettre les progrès de notre démocratie. » Tel fut la réponse du porte parole de l’armée d’occupation sur les ondes de France-Invest.

 

Slomo voit passer les chars sur la Place Castellane. Il ramasse une pierre qu’il trouve au pied d’un arbre et la lance en courant dans sa direction. J’ai l’habitude, dit-il en revenant de sa course. Depuis que je suis petit je fais ça. Je suis venu en France pour mes études le mois dernier. Et je vois que la paix recule toujours et partout. C’est parce que ça n’intéresse pas les puissances financières.

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 10:33

   Août 2009

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

 

L’hôtel de région se trouve sur le tracé du grand mur de séparation. Pour joindre l’extrémité provisoire du mur de Saint Just à celle des Chartreux, l’armée d’occupation hésite, bien que le bateau bleu du Conseil Général soit réquisitionné depuis des années !

Finalement, le bâtiment restera en dehors de l’enceinte maudite. Le mur longera la voie rapide qui arrive de la Rose, traversera le carrefour en le bloquant définitivement, et tout droit, rejoindra les chartreux avant de faire le tour des Chutes Lavies, couper le Boulevard Dada détruit récemment, longer la voie de chemin de fer jusqu’aux Arnavaux, passer entre Saint Louis et les Aygalades, puis entre Saint Henri et Le Grand Littoral pour aller couper en deux parties l’Estaques, en utilisant le tracé de la voie unique du chemin de fer jusqu’aux pentes du Rove.

 

C’est un tracé complètement arbitraire qui présente le grand avantage, pour les financiers de ne mobiliser que les espaces les plus bombardés jusque là. Une autre manière de présenter les choses est d’affirmer que les bombardements furent prémédités pour le tracé de ce fameux mur de la honte.

 

Ce qui arrivera est inéluctable : les terroristes de la nouvelle ville ceinturée ne pourront plus circuler hors de la bande de Paca. « On a les noms ! » affirment les chroniqueurs de France Invest. Ceux qui seront restés au-delà de la ceinture auront du souci à se faire car leur emploi deviendra très vite insupportable et leur demeure placée sous surveillance étroite des forces de normalisation.

 

Madjid en sait quelque chose. A Plan de Cuques, son commerce a brûlé deux jours seulement après qu’il ait égaré un tract sur la banque de la poste, lequel tract invitait à la résistance passive et non violente afin d’obliger l’occupant à respecter les lois qu’il érige lui-même. Par exemple : aucun compte bancaire n’est accessible à ceux qui ne peuvent donner les preuves de la permanence de leur habitat. Pourtant chaque soldat qui squatte sans vergogne les demeures de ceux dont ils veulent spolier les biens, s’inquiète de la réussite quotidienne de ses actions en bourse, auprès de son banquier, le Crédit de l’Armée, CA !

 

Moché a réussit à fournir de la laine dans les Hauts de Vauban, avec la complicité des dominicains de la Rue Edmond Rostand. Ses deux fils ont été enlevés le lendemain même. Depuis, aucune nouvelles ! Quand il se rend à la Préfecture afin de négocier quelques renseignements, les préposés lui réservent toujours le meilleur accueil pour lui assurer qu’ils font tout ce qu’ils peuvent pour l’aider dans ses démarches. Mais il attend toujours, et persiste dans les bureaux deux ou trois fois par semaine au risque de voir péricliter sa petite affaire de réparation des bicyclettes. Sami, heureusement l’aide dans l’atelier. Mais sa banque, du Groupe National de Paris, GNP, le fait appeler de plus en plus souvent pour ajuster les découverts.

 

     Mateo, le sage, celui qui ne dit jamais du mal de personne, assure que la situation ne s’arrangera pas de si tôt parce que les méthodes utilisées ont été expérimentées dans d’autres coins de la planète, et parce que ça marche. On peut toujours démontrer que les occupés ne veulent pas la paix puisqu’ils n’acceptent pas de courber l’échine. On prend leurs terres, on viole leurs femmes, on tue leurs enfants,  on les empèche de travailler, on les affame, ils finissent par partir et chacun s’en réjouit parce que persuadé d’avoir éliminé des terroristes ou des kamikases.
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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 00:21

  Août 2009

 

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

Tiens, Michel, j’ai ramassé quelques pignons tout en haut du Boulevard de la Grotte Rolland, après la Pointe Rouge. J’en avais deux sacs de deux kilos mais le soldat du poste de contrôle de Bonneveine en a voulu un pour faire jouer ses enfants. Je n’ai pas eu le choix ! C’était ça ou rien parce que je ne pouvais justifier d’aucune adresse au-delà du poste qui me permette d’avoir le tampon sur le laissez-passer. « Pour cette fois ! » m’a-t-il lancé en souriant, content de son butin.

Je te remercie, David, les pignons, c’est très nourrissant. On en a bien besoin. Là où nous sommes, dans ces jardins du palais Longchamp, j’arrive à trouver une petite salade de pissenlits tous les jours. Je vais t’en donner un peu pour la maison. Et je connais un petit endroit où sortent en ce moment quelques champignons. Nous irons demain, c’est au Parc Borely, là où tournaient les chevaux. Ils y avaient laissé beaucoup de crottin ! Ca nous fait marcher, mais notre santé passe par là. La seule difficulté, c’est quand le parc est fermé. Je dois escalader un mur et j’ai toujours peur de me faire prendre. Les voisins d’en face, dans l’Avenue Clot Bey me font souvent signe qu’ils se préoccupent de ma sécurité. Ils se mettent à siffler s’ils aperçoivent quoi que ce soit de suspect, une voiture de l’armée ou un drone.

Un quoi ?

Un drone ! On commence à en voir de plus en plus. C’est une libellule qui ressemble à s’y méprendre à une vraie, mais c’est bourré d’électronique et de caméras. Elle passe inaperçue mais avec un peu d’expérience on les repère bien. Avant, les drones ressemblaient à de petits avions. Ce sont des espions efficaces.

Le seul truc qui les perd un peu, c’est la fumée épaisse. Mais le signal est vite donné qu’il y a un feu quelque part, et les marins pompiers, à la botte des occupants, arrivent à une vitesse folle. Tandis qu’un incendie dans le parking, comme ce fut le cas dans le parking Mongrand tout récemment, ne les activent pas du tout. Combien de réfugiés ont péri la dernière fois ! Ils sont arrivés après la bataille. Et les autorités se sont servi des réfugiés eux-mêmes pour sortir les cadavres calcinés. Quand tu penses qu’il n’y a même pas un robinet d’eau dans tout le parking. Enfin, je veux dire que toutes les bouches étaient sans débit.

 

Autour de la prairie, quelques hommes discutent en levant les bras. La bande de Paca, ce n’est rien ! Il y a encore pire là-bas dans un petit bout de désert, le long de la mer. Bientôt, ils ne pourront même plus respirer l’air. On leur fera payer !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 00:14
  Août 2009  

 

L’occupation majeure de ce peuple est de survivre.

L’occupation de ses terres en fait un enfer depuis soixante ans.

 

 

Depuis deux ou trois ans, les voitures se font rares dans Marseille. Le rationnement du carburant n’a cessé de décourager les plus courageux. Les barrages de contrôles devenaient de plus en plus sévères au point que certains ont dû abandonner leur bien sur simple injonction de l’armée d’occupation, en raison du mauvais état du véhicule ou d’un chargement clandestin de quelque poule ou lapin venu des fermes environnantes. Aussi, les parkings souterrains se voient investis de milliers de pauvres gens, soit parce que leur maison fut détruite, soit parce qu’ils ont été expulsés pour réquisition, soit enfin parce qu’ils ne pouvaient plus payer le loyer.

 

Sous le cours d’Estienne d’Orves, tous les niveaux sont déjà pleins. Le groupe financier auquel appartient le parking continue de fermer les accès de onze à cinq heure, et profite de l’aubaine pour demander un payement mensuel aux habitants. « Chaque rat donne deux euros par mois. Ils sont presque au nombre de six mille et s’acquittent en plus de deux autres euros pour les frais d’entretien et de nettoyage. Nous les organisons avec eux, mais disposons de plusieurs agents autoritaires et armés qui choisissent les volontaires trois fois par semaine. La rentabilité de l’espace est assurée parce que nous avons limité les frais d’éclairage et de ventilation. La température est constante toute l’année, au moins dans le dernier sous-sol. Vingt degrés. Mais le plus délicat reste la gestion de la santé de ces rats. Comme la Vierge de la Garde n’est plus là pour veiller, nous craignons une nouvelle épidémie de peste ou de choléra. » Ce sont les propos entendus hier même sur France Invest, la seule radio diffusée en permanence dans le parking.

 

Ce matin, le même interlocuteur s’inquiète des possibles inondations qui décimeraient les rats, ce qui ferait perdre beaucoup d’argent au groupe Nexi. Mais il ajoute que ces événements sont peu probables en raison du fait que la Canebière se jette dorénavant dans la mer bien plus directement que dans le passé depuis les bombardements intensifs qui détruisirent le Vieux Port et toute la ligne de métro enterrée dessous.

 

C’est évident. Il faut marcher sur la Place de Général De Gaulle pour comprendre ce qu’il dit. Le palais de la Bourse n’existe plus, et c’est à peine si quelques blocs de béton colorés des Nouvelles Galeries se distinguent dans les cratères que la mer remodèle sans relâche. Les grandes tours du Cours Belsunce ont les pieds dans l’eau et les vitrages éclatés. Le vieux bâtiment de la Poste Colbert tient sur le haut d’une mini falaise que le fracas des vagues menace de plus en plus.

Pourquoi les vagues ? Il y a longtemps que la grande jetée ne protège plus le port. Il y a longtemps qu’aucun bateau n’est amarré devant la Criée. Et s’il n’y avait des montagnes de sacs de sable tout autour du quai des Belges, et qui remontent sur la Rue de la République, les abords seraient sans cesse attaqués par les flots, qui ne sont plus jamais calmes.

 

Tant d’eau dont on essaye de vaincre l’ardeur destructrice alors que les restrictions de l’eau de la ville continuent de soumettre le peuple à la misère ! Les Marseillais ont l’impression de vivre dans une prison à ciel ouvert !

 

Dans la rue de la Palud, Francis en parle avec son vieil ami Abdu dont les parents vivent au moyen orient. « La bande de Paca, c’est la honte, tout comme là-bas ! Ce sont toujours les riches qui occupent les autres. On dirait qu’ils ne sont jamais assez bien nulle part. Ils en veulent toujours plus ! »

 

 

 

 

 

 

 

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